Végétalisation des villes : la nature comme nouvelle infrastructure urbaine ? (Partie 2/2)

Environnement

Malgré les bienfaits de la végétalisation qui s’impose progressivement comme une nécessité, il demeure de nombreuses entraves administratives à des politiques urbaines écologistes et vertes de grande ampleur. Pourtant, au-delà même des bénéfices relatifs à l’environnement, la végétalisation des villes est porteuse d’opportunités économiques dans la mesure où elle requiert de nouveaux métiers à haute […]

Malgré les bienfaits de la végétalisation qui s’impose progressivement comme une nécessité, il demeure de nombreuses entraves administratives à des politiques urbaines écologistes et vertes de grande ampleur. Pourtant, au-delà même des bénéfices relatifs à l’environnement, la végétalisation des villes est porteuse d’opportunités économiques dans la mesure où elle requiert de nouveaux métiers à haute qualifications.

Les obstacles à la végétalisation des villes

Par les capacités de résilience qu’elle apporte, la végétalisation des villes s’affirme comme une priorité pour le futur des centres urbains et le bien-être de ses résidents. Pourquoi donc les initiatives d’envergure allant dans ce sens restent-elles rares et peinent-elles à se concrétiser ? Quels en sont les freins ?

Les initiatives publiques présupposent l’existence d’une volonté politique et d’un réel volontarisme dans leur mise en œuvre, qu’il s’agisse de végétalisation urbaine ou de toute autre initiative. Or, seules quelques grandes villes comme Paris ou Bordeaux ont édicté des règlements et enclenché des actions spécifiques. Le premier obstacle tient donc au manque d’universalité des pratiques de végétalisation des villes.

Un autre obstacle, typique du maillage français, tient à l’hétérogénéité des politiques publiques en matière d’urbanisme et d’environnement, l’initiative de telle ville pouvant être sapée par le comportement de la ville voisine ou un programme municipal pouvant ne trouver aucun écho dans une communauté de communes, un département ou une région, et inversement.

Le troisième obstacle tient à la pesanteur administrative et à la lourdeur de la maturation des projets, en particulier à cause d’une atomisation des procédures, d’une fragmentation des compétences, d’une réglementation souvent contradictoire et de consultations publiques parfois longues et coûteuses.

Enfin, comme partout en Europe, la plupart des villes ont un riche passé historique et architectural. L’inscription aux Monuments historiques entraîne des contraintes esthétiques et architecturales peu propices aux projets trop résolument novateurs. C’est en partie pour cela que les quelques écoquartiers qui germent ici ou là naissent rarement dans les centres urbains historiques.

D’authentiques infrastructures vertes : défis et opportunités

Contrairement aux époques révolues, la végétalisation des villes ne relève plus de l’amateurisme. Mieux encore, elle constitue depuis quelques années un véritable champ de compétences, avec son ingénierie, son outillage méthodologique et matériel, ses professionnels jouissant d’une formation pointue et multidisciplinaire, ses critères de conception et de contrôle plus précis et plus rigoureux.

On peut aujourd’hui évoquer de véritables infrastructures vertes, comme on parle d’infrastructures de transport, de logement ou d’énergie. Un outillage spécifique a vu le jour, qui inclut parfois des collaborateurs très particuliers : des moutons qui désherbent sans pollution sonore ou chimique, des micro-organismes naturels ou dopés par la science… et, sans doute pour très bientôt, comme avec les autres types d’infrastructures, des outils d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique.

Il s’agit donc aujourd’hui d’un secteur d’innovation avec ses contraintes propres mais qui sont elles-mêmes porteuses d’opportunités par les compétences pointues qu’il requiert et les nouveaux métiers qu’il va être amené à créer. La végétalisation des villes nécessite d’en finir avec les clichés du jardinier du dimanche et de l’amateur éclairé. On fait désormais appel à de véritables ingénieurs et techniciens possédant un bagage scientifique et technologique, capables de respecter les bonnes pratiques et d’écarter les comportements parfois fantaisistes. Le responsable d’une végétalisation réussie doit en effet être à la fois ingénieur, biologiste, agriculteur, pépiniériste, urbaniste, paysagiste et, bien sûr, écologiste.

Les décideurs doivent avoir conscience que verdir une ville peut avoir pour conséquence, du moins si le travail est mal conçu, de la polluer ou de créer un remède pire que le mal. Planter des bouleaux ou des graminées reviendrait à multiplier les allergènes. Et bétonner ou bitumer à proximité immédiate d’un arbre revient à en supprimer une partie des apports bénéfiques.

La question de l’arrosage nécessite en retour une réflexion approfondie sur la conservation de l’eau (récupération, stockage et redistribution des eaux pluviales) et sur le renforcement des nappes phréatiques (sols plus meubles, donc moins bitumés ou asphaltés, arbres et végétaux nécessitant moins d’eau).

En conclusion

Puisqu’il est difficile de supprimer, de mutiler ou d’espacer certains bâtiments, on devra les verdir par le bas (proximité immédiate d’espaces verts), par le haut (cultures sur le toit) ou par les côtés (végétalisation des murs).

Autrement dit, une végétalisation des villes couronnée de succès nécessite des compétences pointues, des installations de grande ampleur et des moyens considérables. Mais aussi et surtout une réelle volonté politique, en particulier lorsqu’il s’agit de construire ou de transformer tout un quartier en écoquartier.