Vers une « révolution industrielle » dans le secteur de la construction La construction n’a guère changé depuis des lustres et reste aussi peu productive qu’il y a 20 ans. D’autres industries, à l’instar de l’agriculture, ont déjà mué et jouissent d’une productivité inimaginable il y a deux décennies. Dans son analyse de février 2017 intitulée Reinventing Construction: […]
La construction n’a guère changé depuis des lustres et reste aussi peu productive qu’il y a 20 ans. D’autres industries, à l’instar de l’agriculture, ont déjà mué et jouissent d’une productivité inimaginable il y a deux décennies.
Dans son analyse de février 2017 intitulée Reinventing Construction: A Route to Higher Productivity, McKinsey Global Institute comparait les secteurs de la construction et de l’industrie manufacturière en mesurant la différence d’évolution au regard de la productivité.
Le secteur de la construction commence lui-même à évoluer, de telle manière que la construction deviendra surtout un métier de production. Il convient de réfléchir dès maintenant aux produits que l’on souhaite, à la manière de les obtenir et aux solutions à mettre en œuvre pour y parvenir.
Le changement de paradigme a déjà commencé, grâce à de nouveaux outils numériques et aux méthodologies (en particulier BIM) qui en découlent. Ce changement s’articule, tout au long de la vie d’un projet, autour de quatre grands axes : standardisation, préfabrication et construction modulaire, impression 3D, robotisation.
De nouveaux outils d’automatisation de la conception permettent déjà de standardiser la construction, tant pour les ouvrages complexes que pour les ouvrages simples.
La standardisation consiste par exemple à construire des stations identiques, à l’image du métro de Copenhague, ou des galeries d’un même diamètre pour l’ensemble des réseaux, comme dans les métros de Chine.
Il en résulte une impressionnante réduction des coûts, même si des ouvrages inhabituels ou hors gabarit ne se prêtent pas encore à une telle standardisation. Mais cette standardisation quasi générale changera autant notre manière de travailler que l’émergence de la robotisation dans l’industrie.
La préfabrication est entrée dans les mœurs du bâtiment, mais pas encore dans celles des travaux publics. Elle va non seulement investir le secteur des travaux publics, mais aussi se développer encore plus dans celui du bâtiment. Cette innovation autorisera une construction plus rapide et moins onéreuse des ouvrages indispensables à la filière BTP.
Déjà présente dans plusieurs secteurs, la généralisation de la construction modulaire reste tributaire du coût de la main-d’œuvre locale. Les donneurs d’ordres ne sont guère motivés par une construction modulaire dans les pays à faibles salaires. En revanche, la construction modulaire deviendra un outil de travail majeur dans les pays où la main-d’œuvre est trop rare ou trop chère. Et là aussi, comme pour la préfabrication, la construction modulaire permettra des gains de productivité significatifs, donc des coûts plus supportables.
Plus vite et moins cher, tel est aussi le double avantage des structures imprimées en 3D, à travers une réduction massive des durées de construction et des coûts de transport. Cela aura en outre un effet beaucoup moins négatif sur l’impact environnemental de la filière.
On sous-estime encore les conséquences positives de l’impression 3D, même si les exemples se multiplient dans le bâtiment et le génie civil à travers le monde. L’impression 3D répond pourtant à de nombreux besoins, tant des constructeurs que de leurs clients. De plus, l’impression 3D s’applique (presque) à n’importe quelle conception en autorisant un haut niveau de personnalisation, le tout pour un coût réaliste et avec beaucoup moins de nuisances et de déchets de chantier.
Comme l’œuf et la poule, la robotisation est à la fois source et conséquence des trois éléments (standardisation, préfabrication et construction modulaire, impression 3D) évoqués ci-dessus.
Et comme dans l’industrie, la robotisation va chambouler la construction en optimisant les tâches répétitives. Car si l’on décompose la construction de nombreux ouvrages, on s’aperçoit qu’elle additionne bien souvent une série de travaux répétitifs. Donc, ici aussi, les possibilités sont considérables et de nombreuses expérimentations sont en cours.
Ces changements vont entraîner, chez les constructeurs, la création d’un nouveau métier : gestionnaire de la supply chain. Ce gestionnaire devra trouver des fournisseurs fiables, solides et capables de fabriquer les pièces requises en respectant la qualité, les coûts et les délais.
On changera alors complètement d’univers. Au lieu de vendre de la main-d’œuvre, le constructeur achètera des pièces pour les assembler hors site (donc avec une meilleure sécurité chantier) ou bien sur site (avec un assemblage plus facile et moins risqué). Cette nouvelle organisation exigera aussi de nouveaux métiers, généralement plus qualifiés.
Ainsi les chantiers permettront-ils des tâches humaines moins nombreuses (puisqu’une partie des éléments sera usinée ailleurs), une production et un assemblage plus rapides, de même qu’une programmation plus fine.
par Mladen ZGELA